Saint Louis-Marie de Grignon de Montfort

l'ami de Jean-Paul II Edito du 26 avril 2012

 

A l'heure où j'ai la joie d'animer le 64ème pèlerinage monfortain à Lourdes, je suis heureux de vous partager ce que j'ai compris grâce à Saint Louis-Marie Grignon de Montfort.

 

En 1990, je ne savais rien de lui. Arrivant de Bourgogne en Vendée, l'évêque de Luçon tout nouveau que j'étais n'en avait que quelques images vagues, celles d'un prédicateur itinérant qui mettait des paroles pieuses sur des airs populaires, et qui se rendait vite insupportable aux évêques dont il parcourait les diocèses en électron libre, indisposant le plus souvent les prêtres.

 

Grâce à de nombreux pères montfortains, aux sœurs de la Sagesse et aux frères de Saint Gabriel, j'ai découvert un géant de la foi, l'infatigable témoin de Jésus : le prêtre maigre qui marche et qui ne cesse jamais de marcher à la cadence de son Seigneur, le bâton à la main et les galoches aux pieds. Comme Jésus, il n'a pas de pierre où reposer sa tête. Sa mission, il la vit comme une passion. Il n'arrête pas de marcher. Il marche, il tient la croix, il parle ; il ne s'arrête que pour prier ; son ardeur nous essouffle ; on le croit encore là, il est déjà ici. Son secret ? Il est simple : il aime le Christ passionnément ; il aime les gens ardemment, surtout les plus simples ; il aime l'Église filialement. Dire qu'il aime le Christ, c'est trop peu : il en est habité, il en est rempli, il en est débordé, il est trop petit pour sa Grâce.

 

On sait l'affection que le Pape Jean-Paul II avait pour Saint Louis-Marie Grignon de Montfort. Il lui avait emprunté sa devise : "Totus tuus" "Tout entier tien". Quel bonheur de l'avoir accueilli à Saint-Laurent sur Sèvre le 19 septembre 1996. Il venait se mettre à genoux devant la tombe de son ami, avant d'entreprendre son septième voyage apostolique en France. Il avait sans doute en mémoire la confidence étonnante qu'il nous avait faite à l'occasion du 50ème anniversaire de son ordination sacerdoce : "Il y eut une période où je remis en cause dans une certaine mesure mon culte pour Marie, considérant que, développé excessivement, il finirait par compromettre la suprématie du culte dû au Christ. C'est alors que le livre de Saint Louis-Marie Grignon de Montfort intitulé "Traité de la vraie dévotion à la Sainte Vierge" fut pour moi une aide précieuse. J'y trouvai la réponse à mes doutes".

 

Aujourd'hui, comme Jean-Paul II, nous sommes très nombreux à avoir compris l'originalité, la fécondité et l'actualité de la doctrine spirituelle de ce grand saint.

 

Elle se résume en cinq formules lapidaires, que j'illustrerai de quelques citations de lui.

 

1.       Par rapport à Dieu, Marie n'est rien du tout : "J'avoue, avec toute l'Église, que Marie, n'étant qu'une pure créature sortie des mains du Très-Haut, comparée à sa majesté infinie, est moindre qu'un atome, ou plutôt n'est rien du tout, puisqu'il est seul "Celui qui est" (VD 14). Voilà de quoi guérir de toute forme de mariolâtrie.

 

2.      Mais, avec Marie, on va plus vite au Christ : "Si la dévotion à la sainte Vierge éloignait de Jésus-Christ, il faudrait la rejeter comme une illusion du diable ; … cette dévotion ne nous est nécessaire que pour trouver Jésus-Christ parfaitement, l'aimer tendrement et le servir fidèlement" (VD 62). Voilà de quoi vérifier que le Christ est bien au centre de la doctrine mariale de Saint Louis-Marie.

 

3.      Avec Marie et par le Christ, nous allons tout droit au cœur du mystère de la Trinité. "Dieu le Père n'a donné son Unique au monde que par Marie… Le Fils de Dieu s'est fait homme pour notre salut, mais en Marie et par Marie. Dieu le Saint Esprit a formé Jésus-Christ en Marie, mais après lui avoir demandé son consentement" (VD 16). Voilà de quoi aller au cœur de la foi : Dieu se révèle Unique en trois personnes qui veulent nous apprendre à nous aimer entre nous comme elles s'aiment entre elles.

 

4.      Avec Marie et grâce à la Trinité, nous réveillons notre Baptême. Se consacrer à Marie, (c'est ainsi que se terminaient toutes les missions prêchées par Louis-Marie), n'est en réalité rien d'autre qu'une "parfaite rénovation des vœux ou promesses du Saint Baptême" (VD 126). Il s'agit de "secouer par le Baptême l'esclavage tyrannique du démon" (VD 34). Voilà de quoi réveiller notre Baptême, devenir enfin les vrais baptisés (les "plongés" dans la vie du Christ que nous devrions être).

 

5.      Enfin, avec Marie, les vrais baptisés prouvent la vérité de leur foi par la vérité de leur charité à l'égard des plus pauvres. En se mettant à leur service bien sûr. Il suffit de voir de quelle manière les Filles de la Sagesse, pour ne citer qu'elles, le vivent aujourd'hui à travers le monde ; elles n'ont pas oublié l'appel que leur adressa celui qui fut, avec Sœur Marie-Louise de Jésus, leur fondateur :

                           "O Filles de la Sagesse, aidez les pauvres perclus, les accablés de tristesse, les estropiés, les rebuts.

                           Ceux que le monde délaisse doivent vous toucher le plus ; il faut bien que j'aime, que j'aime, Dieu caché dans mon prochain"

 

Pas si mal, cette synthèse théologique !

 

X François Garnier

Archevêque de Cambrai

 



1. "Traité de Vraie Dévotion". Nouvelle Edition et Présentation, par le Frère François-Marie Lethel : "L'Amour de Jésus en Marie", Ed. Ad solem, 2000.

2. Louis-Marie Grignon de Montfort – Cantique 149.

Article publié par Cathocambrai • Publié le Mercredi 02 mai 2012 • 6816 visites

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