Le Concile, c'est aujourd'hui !

Ouverture de la célébration du 50 ème anniversaire du concile Vatican II, le 7 octobre 2012 à la cathédrale de Cambrai

 

 

Permettez-moi quelques confidences.

 

En 1962, je suis tout jeune bachelier. J'ai demandé d'entrer au séminaire pour un premier cycle de philosophie. Je suis heureux de me disposer à servir l'Église et de le faire comme prêtre si le Christ m'appelle par elle.

 

C'est juste au moment de l'ouverture du Concile Vatican II. Près de 2500 évêques venus de la terre entière – c'est une première dans l'Histoire – sont convoqués à Rome par le pape – il papa Buono - Jean XXIII. Ils vont vivre un événement exceptionnel dont ils ignorent la durée. Il va falloir "écouter ce que l'Esprit dit aux Églises", comme dit l'Apocalypse, prier et travailler beaucoup avant d'atteindre la presque unanimité et pouvoir dire comme dans les Actes des Apôtres : "L'Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé que…" (Ac 15).

 

En 1870, le Concile Vatican I n'avait qu'à peine commencé lorsqu'il fut brutalement suspendu par la guerre de 70… Les pères conciliaires n'avaient voté précipitamment qu'une note sur "l'infaillibilité pontificale" (dont il reste à la bien comprendre et à la vivre de telle manière qu'elle puisse être comprise par nos frères orthodoxes et protestants) sans avoir eu le temps de la réflexion et de la prière longue sur le mystère de l'Église.

 

Un Concile restait donc à vivre. D'autant plus que de très nombreux responsables, dans les mouvements d'Action Catholiques, les aumôneries de jeunes et le scoutisme, dans les paroisses aussi souhaitaient une Église moins frileuse, moins peureuse, plus inventive et imaginative devant le monde qui changeait. Allait-elle s'enfermer dans une citadelle ou, toutes portes ouvertes, vivre la belle mission d'offrir l'Évangile au monde ? Au prix de quelles conversions ? Deux mondes lui faisaient peur : celui de la science il est vrai souvent prétentieuse ; et celui du monde ouvrier traversé par de justes revendications mais aussi par des idéologies plus que discutables…

 

Il fallait s'arrêter, réfléchir et prier.

 

Vous pouvez alors deviner l'attente qui était la nôtre lorsque notre évêque de Dijon (dont j'ai la joie de porter l'anneau épiscopal, celui que le Pape Paul V remit à chaque évêque à la fin du Concile) revenait : il n'y avait ni internet ni téléphone portable. Nous voulions l'entendre et le questionner. Et lui dire nos espérances d'une Église plus proche du monde comme savait l'être Jésus ! D'une Église qui s'enracine dans la Parole de Dieu mais aussi dans l'actualité de son temps. D'une liturgie qui soit la vraie source de nos courages missionnaires. D'un œcuménisme à vivre pour aller en vérité au-delà de nos divisions. D'une liberté religieuse qui, loin d'être une charte d'indifférentisme, serait à faire respecter par tous, par les états mais aussi par les familles religieuses.

 

Aujourd'hui, je peux le dire que si j'ai souhaité devenir prêtre, c'est bien sûr par la grâce du Seigneur, cela je le sais bien mais c'est aussi à cause de ce grand Concile.

Si j'ai accepté d'être évêque, c'est pour répondre à l'appel de l'Église mais, c'est aussi pour servir fidèlement ce grand Concile.

 

Oh, il n'a pas toujours été bien mis en œuvre. Le temps qu'il a fallu pour éditer les divers rituels liturgiques a été souvent celui d'adaptations fantaisistes. Il est loin d'être encore mis en œuvre. Il n'est pas encore passé avec toutes ses richesses dans la chair et le sang de l'Église. Ses fruits sont encore à venir.

 

Le Concile, c'est aujourd'hui !

X François Garnier

Archevêque de Cambrai

 

 

Article publié par Cathocambrai • Publié le Vendredi 23 novembre 2012 • 2448 visites

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