Chers diocésains,
L’Église vient de fêter Saint François d’Assise, le 4 octobre. En ce XXIème siècle, comme au début du XIIIème, siècle marqué par toutes les formes de violences sociologiques, politiques et religieuses, nous voilà provoqués à reprendre « le chemin de François ».
Merci à Monsieur l’Abbé Jean Marc Bocquet d’en montrer l’éternelle nouveauté.
+ François Garnier
Archevêque de Cambrai
LE CHEMIN DE FRANCOIS
Est-ce le temps des chrétiens qui s’annonce ?
Voilà une question qui pourrait paraître saugrenue, alors que partout les courbes sont en baisse, les lieux de culte sont abandonnés, les esprits contemporains d’Europe occidentale se rebellent contre une institution qu’on dit ringarde, dépassée, moribonde. Que la sève qui nourrit les attitudes croyantes est rejetée comme empêcheuse de consommer en rond.
Mais ces questions qu’on occulte avec obstination reviennent de plus en plus vigoureusement : comment vivre ensemble ? A qui confier la commune destinée de l’humanité ? A qui faire confiance ? Quel modèle suivre ? Quel sens donner à notre vie ? La planète et ses habitants verront-ils le prochain siècle ?
On y a cru, aux horizons roses et aux grands soirs. « Camarades, en avant, le vieux monde est derrière nous », chantaient les murs du mois de mai 68. Et les prophètes « visionnaires » ne manquaient pas : politiques, économistes entreprenants, servants des médias engloutis dans la pub. Mais voilà. Aujourd’hui, le bilan est décevant. Angoissant même : amertume, défiance, révolte, échecs et larmes pour une majorité de nos semblables, des gens en précarité, mais aussi classes moyennes et dominantes, qui se croyaient à l’abri.
Le vide….Un silence lourd, car notre société s’est rendue muette et aveugle aux voies de salut. Et pourtant…
Une petite voix se laisse entendre, venue des bidonvilles de Buenos Aires. Des gestes d’humilité et de respect premier des plus blessés. Des paroles simples, des gestes de tendresse, de petites anecdotes très ordinaires, comme des paraboles comprises par tous. Un sourire. De l’Evangile en actes.
Un petit souffle qui étonne, séduit, et fait tomber les illusions parasites qui rendent aveugles et sourds les dévôts de la consommation et de la domination. Et laisse couler sur tous ceux que lèse et déçoit notre monde, un courant d’Espérance, une question qui amène un sursaut pas désespéré. On parle de bonheur, de service, de joie. Un langage par trop oublié.
Il y a des paroles étranges dans l’Evangile, qu’on esquivait prudemment dans nos prières, nos études, nos homélies. Elles parlent de cataclysmes, de signes dans le Ciel, de calamités et de massacres. Des considérations hors du temps, disions-nous : nous avons accédé, après tout, à l’ère de la Raison et de la prospérité. Mais voilà que ces descriptions d’apocalypse, nous y sommes. Même la Nature est atteinte, déréglée. Et les persécutions….Comme chrétiens, nous nous sentions en sécurité, abrités, au point de nous endormir et de laisser faire les autres, et de laisser mourir paroisses et mouvements. Mais voilà que surgissent l’Irak, la Nigéria, la Syrie, le Laos et combien de pays où c’est au prix du sang qu’on est croyant…
Mais voilà que se propose à nous le chemin de François. Osons le prendre, envers et contre tout, nous avons un pasteur. Notre responsabilité est de vivre l’Evangile là où nous sommes, de créer de la paix, et d’être à l’affût de tous ceux et toutes celles qui, parce que dans les années 60, on a estimé plus important de laver sa voiture que de se réunir entre croyants et de saisir à bras-le-corps les souffrances et les espoirs des gens de chez nous, ont laissé désarmées les générations d’aujourd’hui, sans horizon, sans fêtes ni raison d’être.
Jean Marc Bocquet