Liberté - Egalité - Fraternité

 

En 1903, dans le climat des grandes tensions entre notre Église et l'État, on grava les trois mots de notre devise nationale au fronton de l'église de Marchiennes, sans doute pour les rappeler aux catholiques réputés alors royalistes et anti-républicains ! Alors que la fièvre pré-électorale monte en notre pays, je regarde ces trois mots et souhaite bien sûr qu'ils soient les trois repères pour chaque habitant de notre nation, croyant ou non. Mais pour les croyants au Christ, chacun des ces trois mots devrait avoir une saveur toute particulière.

 

La Liberté ?

Pour Jésus, elle est de choisir d'obéir à son Père et d'accomplir son désir. Cette liberté est à l'évidence aux antipodes de la liberté grossière qui consiste à croire que chacun peut faire ce qu'il veut, où il veut et avec qui il veut. Pour Jésus, la liberté, c'est aussi celle d'affronter s'il le faut ses frères juifs, dès qu'il les voit "filtrer le moustique et avaler le chameau" (Mt 23, 24), c'est à dire placer la pratique minutieuse des plus petites obligations légales avant la charité à vivre et les secours nécessaires à porter. Pour Jésus, la liberté, c'est enfin celle d'oser dire aux bons pratiquants de son temps (et de tous les temps) que "les publicains et les prostituées (les) précèderont dans le Royaume des Cieux"(Mt21,31), parce qu'ils se sont "repentis" et ont "cru". Elle est belle et vraie cette liberté !

 

L'Egalité ?

Pour Jésus, vivre l'égalité, c'est oser affirmer que le journalier qui n'a travaillé qu'une heure à la vigne, après avoir attendu en vain dès le matin d'être embauché, mérite le même salaire que celui qui a peiné tout le jour (Mt 20,9).

Il est grand, ce Dieu qui voit le prix de la longue attente, le prix de l'angoisse du chômeur qui va rentrer chez sa femme et ses enfants sans avoir gagné sa journée. Et il est beau, ce Dieu qui offrira le même ciel à tous, au plus saint des dernières secondes comme au plus saint des premiers jours, ce Dieu qui est capable de dire au criminel repentant crucifié près de lui : "Aujourd'hui tu seras avec moi dans le paradis !" (Lc 23,43). Elle est belle et vraie cette égalité !

 

Quant à la Fraternité ?

Elle est tellement évidente dans tout l'Évangile. Elle choque ses frères juifs tant elle n'a pas de limite. "Toute vie compte pour lui y compris la plus fragile, la plus malade, la plus handicapée, la plus méprisée, la plus ratée. Chacun devant Jésus peut découvrir qu'il a toujours une valeur infinie" (homélie de la Pentecôte – Nungesser - 13 juin 2011). Elle est belle et vraie cette fraternité !

 

En regardant les trois mots de notre devise nationale fraîchement repeints à neuf par la municipalité, ma prière était simple :

 

P  Que notre liberté devienne celle de savoir choisir, pour nous-mêmes et grâce au Christ, des conduites infiniment plus saintes que celles auxquelles nous obligent les lois de notre pays ;

 

P  Que notre façon de vivre l'égalité devienne celle de savoir donner plus à celui qui a moins et moins à celui qui a plus, en nous donnant nous-mêmes sans trop compter ce que nous donnons de nous.

 

P  Quant à notre fraternité, qu'elle devienne plus réelle entre nous tous :

Nous savons l'appel du Christ : "Aimez vous les uns les autres" ; si nous ne nous aimons pas les uns les autres, si nous nous jalousons, si nous nous critiquons par derrière, si nous ne savons pas dépasser nos conflits humblement dans la vérité des rencontres et de la prière, toute notre mission dans le monde sera stérilisée. Ce qui montrera toujours la vérité de notre foi sera toujours  la qualité de notre charité.

 

 

 

X François Garnier

Archevêque de Cambrai

 

Article publié par Michel LEMAIRE • Publié le Samedi 01 octobre 2011 • 3615 visites

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