L'Église que j'aime ? C'est celle du matin de Pentecôte. Un matin éclatant comme la flamme réveillée par le vent. Eclatant comme le buisson ardent dont le feu brûle sans détruire.
L'Église du matin de Pentecôte ? C'est celle qui découvre le grand souffle qui l'anime, cet Esprit qui vient de Dieu, qui conduit à la vérité toute entière, qui délivre des peurs juvéniles et des vieilles paresses, qui parle toutes les langues pour porter la meilleure de toutes les nouvelles à toutes les nations.
L'Église du matin de Pentecôte ? C'est l'Église qui rend fort ceux qui vont connaître les persécutions : le Christ questionne trop le pouvoir des puissants, l'argent des possédants et la science des savants pour que ses disciples ne risquent pas leur vie en l'annonçant !
Je t'aime, Église du matin de Pentecôte et de tous les matins du monde : tu nous réveilles tous avec l'Évangile et les grandes paroles de Jésus : "Va, vends, donne, viens, suis-moi", "lève-toi et marche", "ne pèche plus, moi aussi je te pardonne", "aime ton ennemi", "ce que tu as fait au plus petit d'entre les miens c'est à moi que tu le fais"…
Je t'aime, Église du matin de Pentecôte et de tous les matins du monde ! On te croit perdue et tu ressuscites. On programme ta disparition et tu résistes. On t'asphyxie et tu retrouves souffle. On te persécute et tu te développes. Chaque jour, avec ton Seigneur, tu transformes les pierres en pains et les pécheurs en saints. Sans l'Esprit Saint, il y a si longtemps que tu aurais disparu comme une secte de passage.
Je t'aime, Église du matin de Pentecôte : tu donnes le Christ à jamais levain dans la pâte lourde du monde, à jamais lumière dans la nuit des hommes, à jamais sel savoureux qui redonne goût de vivre.
Je veux dire de toi ce que Péguy fait dire à Dieu de l'espérance dans "le porche de la deuxième vertu" :
"Comment que ça se fait que cette éternelle fontaine
Eternellement jaillisse.
Que cette éternelle source
Eternellement source.
Il doit y avoir un secret là-dedans
Quelque mystère.
Comment elle s'y prend (l'Église),
Pour faire de l'eau jeune avec de l'eau vieille.
Des jours jeunes avec de vieux jours.
De l'eau neuve avec de l'eau usée.
Des sources avec de la vieille eau.
Des âmes fraîches avec de vieilles âmes…
Des matins jeunes avec des vieux soirs…
Comment elle y réussit, comment elle s'y prend,
Ça, mes enfants, c'est mon secret,
Parce que je suis son Père."
X François Garnier
Archevêque de Cambrai